En résumé :
Naissance et formation (1469-1498) : Né à Florence en 1469, Machiavel grandit dans une ville en plein tumulte politique. Il reçoit une éducation humaniste et s’imprègne des auteurs antiques, notamment Tite-Live.
Carrière politique (1498-1512) : Il devient secrétaire de la République florentine et joue un rôle clé dans la diplomatie et l’organisation militaire. Il observe de près les jeux de pouvoir des grandes figures de son temps, comme César Borgia et Louis XII.
Chute et exil (1512-1513) : En 1512, les Médicis reprennent le contrôle de Florence. Machiavel est arrêté, torturé, puis exilé dans sa propriété rurale. Écarté du pouvoir, il se consacre à l’écriture.
L’œuvre majeure : Le Prince (1513) : Dans cet ouvrage, il analyse le pouvoir de manière réaliste, affirmant qu’un dirigeant doit parfois user de ruse et de force pour se maintenir. Son pragmatisme lui vaudra une réputation sulfureuse.
Fin de vie (1513-1527) : Il tente de se rapprocher des Médicis mais reste en marge. Il meurt en 1527, juste après la chute des Médicis, sans avoir retrouvé un rôle politique actif. Son œuvre influencera durablement la pensée politique occidentale.

Niccolo Machiavel n’écrit pas ces quelques mots à l’aube de sa jeunesse, et encore moins dans la plénitude de sa carrière, alors qu’il travaillait comme une fourmis ouvrière au sein de la commune de Florence. Brisé par la question, en exil, il rédige un ouvrage non pas pour la postérité mais dans une volonté presque servile de récupérer la confiance de ses anciens maîtres, les Médicis. Il n’obtiendra pas ce pour quoi il s’obstine à mettre en oeuvre.
Machiavel meurt quelques années plus tard, laissant comme héritage son “Prince” et un adjectif qui ne le quittera désormais plus : machiavélique. En est-il réellement un digne héritier ? Est-ce à ce point un brûlot si néfaste qui ira jusqu’à pousser Frédéric II de Prusse à écrire son Anti-Machiavel ? Le principal intéressé aurait bien un sourire moqueur à la commissure des lèvres. La question du jugement n’a ici aucune importance.

Machiavel ne connait que trop bien les arrivistes, les tièdes et surtout la colère du peuple. Machiavel ne connait que trop bien les arrivistes, les tiédeur et surtout la colère du peuple. Le fils du pape Alexandre VI, César Borgia, a déchainé toutes ces passions auprès de ses contemporains. L’admiration a fait place au pragmatisme bien connu de l’auteur, se rappelant au passage la justesse de Tite-Live : « A peine le peuple eut-il cessé de le craindre qu’il commença à le regretter. » (VI, 9). Une bonne occasion de faire un saut dans le temps, à une ère que l’on répète lumineuse, la Renaissance italienne. Pour l’historien Jean Delumeau, la beauté des artistes doit être tempérée : « La Renaissance ne se présente pas comme un progrès continu. La beauté y a constamment côtoyé la cruauté, et l’ombre la lumière. »
Dans la Florence du XVIe siècle, il est peu probable qu’un notable florentin aurait pu donner – si ce n’est prédire – des leçons de notre temps, mais comme l’être humain est sujet aux passions bien humaines, les notions de foi, de trahison, d’émerveillement, de dégoût, de rationalité, d’excès et d’amour sont, quant à elles, bien intemporelles.

Machiavel se remémore l’anarchie à Florence causée par deux grandes familles de Pistoia, les Panciatichi et les Cancellieri en 1501 et 1502. La République, en laissant faire, à créer des tensions chaotiques insoutenables dans la ville.

L’Italie n’avait alors pas d’unité et certains États devaient occasionnellement faire appel à des mercenaires pour assurer leur sécurité, voire constituer une force d’assaut. Une erreur commune que même certains pays modernes continuent de commettre.

La France, alliée de Florence, a demeuré une puissance déstabilisatrice dans les États italiens. Machiavel reprend surtout la bonne morale de Tite-Live dans ce cas-ci (XXXV, 48). Être allié d’un puissant comporte autant d’opportunités que de risques, même en 2024.

La destruction causée par Savonarole est encore dans toutes les mémoires. Fasciné par son charisme, il l’était moins pour son idéologie mortifère. Machiavel est un Romain de l’Antiquité dans l’esprit. La cité doit prévaloir. Il cite Cicéron et Tite-Live en ce sens. Une cité, ancienne ou moderne, ne doit pas tomber sous le joug d’une communauté qui n’honore pas le bien commun et la virtu du prince.

Période de libération, les fêtes ou les carnavals, qui permettaient pour un temps court de se libérer des contraintes sociales, sont un atout pour juguler la pression populaire, selon Machiavel. Nous ne savons pas ce qu’il aurait dit des Jeux Olympiques, ceci-dit. Peut-être aurait-il trouvé une citation d’Aristote pour l’acquiescer.


Machiavel fait référence à Coriolan, rapportée par Tite-Live. Figure patricienne de la République romaine, il fut exilé à la suite d’une disette. Sauvé par les tribuns et la loi de Rome, il nous rappelle, encore aujourd’hui, combien des institutions solides doivent prémunir de laisser au citoyen le droit de se faire justice lui-même. Et de se rappeler combien il est important pour un cité de se faire respecter et d’appliquer les lois partout sur son territoire.

La passion des peuples défait des hommes, mais parfois les rappelle au pouvoir, en témoigne Cosme de Médicis. L’expression de la liberté, juste ou injuste à un instant T, est le droit du peuple bafoué. Pour résumer en une phrase, Machiavel cite Tite-Live qui fait référence à Hiéronyme de Syracuse au 3e siècle avant J.-C. : « Tel est le caractère de la multitude : ou bien, elle sert bassement, ou bien elle domine avec superbe » (XXIV, 25). Citation toujours valable.

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Pour en savoir plus
Il Principe dit Le Prince, Machiavel.