Fanny Kelly, captive des Sioux
Fanny Kelly, captive des Sioux

Fanny Kelly, captive des Sioux

Fanny Kelly, captive des Sioux

Contexte de l’expansion américaine au XIXe siècle

Image d'illustration, Zhuo Shu Liang

Destinée manfeste

Au cœur du XIXe siècle, alors que les États-Unis sont en pleine expansion territoriale, Fanny Kelly, jeune femme de dix-neuf ans, se joint à ces milliers de pionniers qui façonnent le Nouveau Monde. Animée par l’esprit d’aventure propre à cette ère de conquête et de découverte, elle entreprend, aux côtés de son époux, de leur fille adoptive et de quelques compagnons de route, un périple audacieux à travers ces terres inconnues.

Refusant de s’intégrer à l’un des vastes convois dûment escortés, la petite compagnie choisit de s’engager sur un chemin plus aventureux, se dirigeant résolument vers les implacables Rocheuses.

Cependant, le 12 juillet 1864, alors qu’ils traversent les vastes étendues de l’actuel Wyoming, leur périple prend une tournure tragique : ils sont attaqués par une bande redoutable de Sioux Oglalas. Cette rencontre brutale avec les autochtones va bouleverser la vie de Fanny Kelly, la plongeant au cœur d’un conflit inévitable lors de cette époque de colonisation.

« Si tu tires le moindre coup de feu, dira Fanny Kelly à son mari, tu scelleras notre destin. Ils sont dix fois plus nombreux que nous. Ils nous massacreront jusqu’au dernier », dit-elle.

Après une manœuvre obséquieuse de l’Indien Oglalas venu à leur rencontre et une tentative d’apaisement avortée, les Sioux pillent le campement, tuent plusieurs personnes – dont les domestiques de la famille, et emmènent Fanny et la petite fille en captivité.

Le mari, quant à lui, parvient à s’échapper in extremis.

« Nous rencontrâmes de jeunes métisses aux cils lourds, aux joues brûlées par le soleil, qui trottaient sur leur monture. J’étais surprise d’observer tant de femmes parmi les voyageurs et de noter avec quelle aisance elles enduraient les épreuves d’un tel périple. »

Fanny Kelly, Russell Reid Photography Collection
Image d'illustration, Zhuo Shu Liang

« M. Taylor… Jamais je n’oublierai son visage à l’instant où il reçut une balle en plein front. Il tomba à la renverse en me fixant, déjà mort. Je fus la dernière chose sur laquelle il posa les yeux en ce bas monde. »

Survie et compromis

Fanny se retrouve alors seule, perdue dans l’immensité d’un monde qu’elle ne reconnaît plus, sans savoir ce qu’il est advenu de son mari, dont l’absence lui pèse énormément. En chemin, elle fait le sacrifice déchirant de se séparer de sa petite fille adoptive, espérant ainsi lui offrir une chance de s’échapper vers la liberté. Livrée à elle-même, elle doit désormais affronter un peuple dont les codes et les coutumes lui échappent complètement, amplifiant son sentiment d’isolement.

« La nuit suivante, on m’ordonna de m’allonger sur le sol aux côtés d’un Indien blessé. D’autres prirent place en cercle autour de moi pour me surveiller, augmentés de trois farouches guerriers qui s’assirent tout près, le tomahawk à portée de main. » Cette scène, à la fois terrifiante et humiliante, illustre à quel point sa situation est précaire. Fanny est constamment bousculée, parfois menacée de mort, son existence suspendue à un fil fragile, chaque jour apportant son lot d’incertitudes.

Cependant, son salut vient du vieux chef Ottowa, qui, reconnaissant en elle une force cachée, décide de la prendre sous son aile. Son intervention lui offre une lueur d’espoir au milieu des ténèbres. Néanmoins, la jalousie des autres squaws, ces femmes indiennes qui voient d’un mauvais œil la protection accordée à Fanny, complique encore sa fragile position au sein de la tribu. Elle se retrouve ainsi piégée entre l’appréhension d’un peuple qui lui est étranger et le besoin de gagner la confiance de celles qui pourraient devenir ses alliées ou ses ennemies.

Image d'illustration, Zhuo Shu Liang

« J’avais été chargée de porter le fusil, l’arc et les flèches du chef, mais alors on soulagea de leur fardeau mes bras rompus, et j’implorai mes ravisseurs de m’accorder le privilège de dresser le campement nocturne. […] Nous poursuivîmes notre périple jusqu’à près de midi, puis nous fîmes halte dans une vallée non loin de Deer Creek. C’était une vallée superbe et lumineuse que celle où nous prîmes du repos en attendant que les rayons embrasés du soleil aient reflué derrière l’horizon. »

Image d'illustration, Zhuo Shu Liang

Pendant ce temps, Fanny noue une amitié avec une autre femme blanche, également capturée, et ensemble elles partagent leurs peines et leurs espoirs, mais cette complicité s’avère éphémère. Bientôt, elle se retrouve à nouveau seule, confrontée à la dureté de son existence. Un jour, épuisée par les épreuves, elle se sépare du calumet de la paix du chef, un geste lourd de signification qui provoque la colère des Indiens et la met au bord de la mort.

Au fil des semaines, à travers une alternance de tensions palpables, de privations sévères et de quelques instants de compréhension mutuelle, elle commence à explorer les traditions des Sioux et leur riche culture, découvrant ainsi des aspects d’eux-mêmes qui lui étaient jusque-là inconnus.

Cependant, malgré ces moments d’échange, Fanny n’est pas dupe de sa condition. En tant que prisonnière blanche, elle devient une captive de choix, pleinement consciente des implications de son statut au sein de cette communauté étrangère, oscillant entre fascination et désespoir.

Après sa libération, son histoire, qu’elle raconte dans un livre, deviendra un récit poignant de terreur et d’espoir. C’est aussi un témoignage unique et saisissant sur la vie des Sioux au XIXe siècle.

Son histoire rejoint aussi d’autres cas, mais allons plus loin. Fanny Kelly est un personnage intéressant, loin d’être monolithique dans son mode de pensée. Son attitude envers ses ravisseurs est réaliste sans pour autant être de la haine. Elle restera digne devant la mort de son enfant, Mary, tuée par des Indiens.

Agacée, elle s’emporte sur les “philanthropes chatouilleux qui pensent que les nobles Peaux-Rouges de leur imagination ne se devaient conquérir que par des méthodes à l’eau de rose.” Fanny est et reste une pionnière du XIXe siècle, sans pour autant être indifférente.

A travers ses écrits, elle retient l’attachement des Indiens pour la nature, le fait qu’elle n’a pas été violée (selon ses dires) et raconte l’histoire d’Elizabeth, une autre captive qui, elle, prendra la défense des Indiens.

En savoir plus :

Récit de Fanny Kelly aux Editions Payot

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *